LAURETTE, s’asseyant en face de Pasquin.
En votre aimable compagnie,
Puisqu’il me faut passer ma vie,
Permettez-moi, monsieur Pasquin,
De me placer sur cette chaise
Pour admirer tout à mon aise
Vos grâces jusques à demain.
PASQUIN.
Admirez si cela vous plaît !
LAURETTE, après l’avoir regardé.
Ah ! mon Dieu ! que vous êtes laid !
PASQUIN.
Pourtant je sais une fille,
Une fille assez gentille,
Qui pour moi se meurt d’amour.
LAURETTE.
En soignant sa basse-cour !
PASQUIN.
Non, vraiment, mademoiselle ;
Ce n’est pas là son état.
LAURETTE.
Et quelle est donc cette belle ?
PASQUIN.
La fille d’un podestat !
LAURETTE.
L’insolent ! l’insolent !
PASQUIN.
Calmez cette colère !
Et puis après,
D’un œil moins sévère,
Et d’un peu plus près,
Voyez ma figure…
Voyez ma tournure !
(Se pavanant ridiculement devant
elle.)
Suis-je toujours laid ?
LAURETTE.
Oui, je vous le jure.
PASQUIN, ôtant son bandeau de dessus son œil.
Suis-je toujours laid ?
LAURETTE.
Dieu ! cette figure !…
Silvio !… c’était toi !…
SILVIO.
Dans mes bras je presse
Ma chère maîtresse !
A toi ma tendresse !
A toi tout mon cœur !
Après longue absence,
Amour et constance,
Voilà l’espérance,
Voilà le bonheur !
LAURETTE.
Dans ses bras il presse
Sa chère maîtresse !
A moi sa tendresse !
A moi tout son cœur !
Après longue absence,
Amour et constance,
Voilà l’espérance,
Voilà le bonheur !